par Chitsu » 10 Avr 2015, 20:37
Jane Eyre, p.206.
[spoil][quote]Il est bien vrai que "la beauté est dans l'oeil du spectateur". [...] Mais ils avaient pour moi quelque chose surpassant la beauté : un intérêt, une influence, qui me dominaient complètement et me retiraient la maîtrise de mes sentiments en les rivant aux siens. Je n'avais pas eu l'intention de l'aimer ; le lecteur sait que j'avais durement lutté pour extirper de mon âme les germes d'amour que j'y avais découverts ; et maintenant, sa vue seule leur redonnait spontanément vie, avec force et vigueur ! Il se faisait aimer de moi sans même me regarder.[/quote][/spoil]
Et puis un passage entier d'Ellana (le deuxième tome, si je ne me trompe pas).
[spoil][quote]Ellana sauta à terre et se précipita pour plonger son visage dans l’eau fraîche.
- Alors, grand chef, tu…
Elle se tut. Hurj vacillait sur sa selle, livide, le front couvert de sueur.
- Hurj !
Elle se précipita mais déjà le jeune Thül avait basculé. Il s’écrasa dans l’herbe, effrayant son cheval qui recula de quelques pas. Ellana se jeta sur lui.
- Hurj, qu’est-ce que…
- Du calme, gamine, la coupa-t-il d’une voix aussi blanche de son teint. C’est juste un coup de fatigue. Rien de grave.
Ellana ne répondit pas. Les yeux écarquillés par l’effroi, elle contemplait la tunique imbibée de sang de son ami et le manche du poignard qui dépassait de sa poitrine.
Il suivit son regard et sourit.
- Ah, ça ? souffla-t-il. Une peccadille. Un de ces fils de Raïs a été plus rapide que je ne m’y attendais. Il en a profité pour faire le malin.
Ellana approcha de l’arme une main dont elle ne parvenait pas à maîtriser les tremblements.
- Je crois que tu devrais t’abstenir de toucher ce canif. Si tu l’enlèves, ça va saigner et je n’ai pas de tunique de rechange.
Elle obtempéra, incapable d’ôter ses yeux du manche du poignard.
Un manche d’acier.
- Piu, tu te déplaces un peu ? Comme ça je pourrai poser ma tête sur tes genoux.
- Je m’appelle Ellana, Thül stupide, lâcha-t-elle en serrant les mâchoires pour tenter de juguler son émotion.
- D’accord. Voilà. On est bien comme ça, non ?
- Oui. On est… bien.
- Tu vois, Piu, même les héros thüls ont parfois des coups de fatigue. Tu n’es pas déçue ?
- Non Hurj, pas déçue du tout.
- Alors je peux te faire une confidence ?
- Oui, bien sûr.
- Tu te rappelles, l’autre jour, quand je t’ai demandé si tu voulais m’accompagner jusqu’à mon village ?
- Oui, je me rappelle.
- J’aurais pu te donner une explication plus courte, plus simple, plus vraie, mais je n’ai pas osé. Tu n’es pas bien effrayante, mais je n’ai pas osé. C’est drôle, non ?
Ellana essuya ses yeux d’un revers de manche, forçant sa gorge nouée à laisser passer une question.
- C’était quoi ton explication, grand chef ?
- Je t’aime.
Il se mit à trembler.
- C’est la première fois que je dis ça à une fille. Je n’ai pas l’habitude, ça fait tout chaud, là.
Elle passa la main dans ses tresses. Les caressa doucement. Les larmes qui ruisselaient sur ses joues engloutissaient son présent, noyaient son futur. Emportaient son âme. Elle avait le sentiment que c’était sa vie à elle qui s’écoulait.
- Moi aussi je t’aime, murmura-t-elle.
Il hocha la tête.
- Ca c’est une bonne nouvelle, souffla-t-il. Maintenant je vais dormir un peu. Quand je me réveillerai, on amènera ces fichues pierres à Al-Far puis je te conduirai dans mon village. C’est un beau village, il te plaira.
Il ferma les yeux.
- Hurj, je…
- Tout à l’heure, Piu. Tout à l’heure.
Il mourut le sourire aux lèvres.[/quote][/spoil]
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